Les camps de personnes déplacées

La Seconde Guerre mondiale a provoqué de vastes mouvements de population, d’une ampleur sans précédent, qu’il s’agisse des personnes ayant fui les combats et ceux que les Alliés appellent les personnes déplacées (DP’S) : survivants des camps de la mort mais aussi Polonais, Baltes ou Allemands voulant échapper à la tutelle soviétique.
Au sein de ces populations déplacées, les Juifs rescapés sont une minorité : au sortir de la guerre, 60 000 survivants juifs de différentes nationalités se trouvent en Allemagne – dont 28 000 Allemands. Deux ans plus tard, ils seront environ 230 000 dans la zone occidentale. Cet accroissement est provoqué par le contexte de guerre froide et l’antisémitisme sévissant encore en Europe de l'Est. Plusieurs pogroms ont lieu en Ukraine, en Hongrie et en Pologne en 1944-1946 provoquant la mort, selon l’historien Jan T. Gross, de 1 500 personnes.
Or, les démocraties occidentales, États-Unis compris, ne souhaitent pas accueillir les Juifs. De son côté, la Grande-Bretagne s’oppose à leur installation en Palestine.

Vivre libre dans les camps libérés

L’UNRRA

À l’initiative du président Roosevelt, 44 pays se sont associés, en novembre 1943, pour créer l’UNRRA (Administration des Nations unies pour le secours et la reconstruction) afin de préparer l’assistance et le rapatriement des personnes déplacées.
Au printemps 1945, celles-ci sont évaluées à 8 millions. En théorie, il ne s’agit au sens strict que des personnes qui ont dû quitter leur pays d’origine, les autres étant considérées comme des réfugiés. Toutefois, à partir de décembre 1945, l’UNRRA inclut l’ensemble des Juifs parmi les DP’S, même s’ils ont la nationalité des pays qu’ils veulent quitter.
Dans les mois qui suivent la libération, les Alliés parviennent à rapatrier près de 5 millions de personnes mais 2 millions doivent rester sur place. En 1945, l'UNRRA gère plusieurs centaines de camps de personnes déplacées en Allemagne, en Italie et en Autriche. Son travail s’opère en lien avec les administrations militaires alliées et avec des associations caritatives parmi lesquelles les associations juives jouent un rôle important : l’OSE, le Joint, ou encore l’ORT.
L’aide apportée est à la fois sanitaire, médicale et sociale. Toutefois, l’UNRRA ne parvient pas, faute de moyens suffisants, à faire face à la crise des DP’S dont la gestion revient, dans une large mesure, au SHAEF (Supreme Headquarters Allied Expeditionary Force).

Le rapatriement des déportés

Les DP’S sont aussi regroupés dans des centres ouverts pour la circonstance, appelés camps. Certains anciens camps de concentration sont ainsi reconvertis, de même que des bâtiments occupés par les autorités allemandes ou la Wehrmacht.
Ainsi, à Wildflecken, un ancien camp d’entraînement de l’armée allemande passe sous le contrôle de l’UNRRA, accueillant jusqu’à 17 000 personnes, principalement des Polonais. S’ils peuvent de nouveau manger à leur faim, les anciens déportés doivent supporter la promiscuité et des conditions souvent précaires. De fait, Juifs et non-Juifs se retrouvent dans ces centres souvent surpeuplés. Dans la zone contrôlée par les Américains, ils sont parfois regroupés dans des camps spécifiques.
En 1952, il ne reste plus que deux camps : le dernier, le camp de Wels en Autriche, sera fermé en 1959.

Bergen-Belsen

Les Juifs déplacés dans la zone britannique ont été logés principalement dans le camp de Bergen-Belsen DP.
Dès le 18 avril 1945, trois jours seulement après la libération du camp, un comité de camp est mis en place et devient l'organisme représentatif des survivants dans la zone britannique.
Josef Rosensaft (1911-1975), survivant d’Auschwitz-Birkenau et de Bergen-Belsen après les marches de la mort, est élu président du comité du camp et devient le porte-parole des Juifs dans la zone britannique. Lorsque le comité du camp est transformé et développé en Comité central des Juifs libérés dans la zone britannique, Rosensaft met en place plusieurs missions au sein du comité, notamment la recherche de membres de la famille, la réadaptation physique et psychologique des survivants, et la lutte pour leurs droits.

Zeilsheim

Camp de personnes déplacées situé dans la zone d’occupation américaine et installé sur un site composé de petites maisons ouvrières où résidaient, auparavant, des ouvriers travaillant pour l’IG Farben. Jusqu’à 4 000 Juifs y séjournèrent. Les personnes déplacées résidaient dans des maisons en dur et non dans des baraques mais, comme d’autres camps de DP’S, Zeilsheim était surpeuplé. L’UNNRA et des organisations d’assistance juive vinrent en aide aux rescapés.
Jusqu’à sa fermeture, en novembre 1948, une microsociété juive très structurée s’y reconstitua. En mai 1947, 600 naissances avaient été recensées dans le camp. Plusieurs écoles, dont une de l’ORT, furent créées. Une synagogue fut construite. Une vie culturelle très intense se développa principalement autour d’une formation théâtrale et d’un ensemble de jazz. Des institutions religieuses et politiques, sionistes en particulier, virent le jour. Quelques journaux circulèrent, comme les titres en yiddish Unterwegs (En Transit) et Undzer Mut (Notre Courage). Eleanor Roosevelt visita le camp en 1945. De nombreuses protestations contre la politique britannique en Palestine s’y déroulèrent, notamment lors de la visite de David Ben Gourion en 1946.
Après la fermeture du camp, les survivants se rendirent aux États-Unis ou en Israël.
© Mémorial de la Shoah.
© Mémorial de la Shoah.
Domaine public.
Source : United States Holocaust Memorial (Museum Wollheim apers).