Par définition, les photographies prises à la libération rendaient compte d’un univers révolu.
Lee Miller photographia
Buchenwald alors qu’un peu d’humanité avait déjà été rétablie :
« Beaucoup de choses avaient déjà été remises en ordre, c’est-à-dire qu’il n’y avait plus de corps encore chauds et étendus à terre et tous ceux susceptibles de tomber morts sur place se trouvaient à l’hôpital. »
En Europe occidentale, les photographies des camps allemands et autrichiens furent beaucoup plus nombreuses à circuler que celles des camps et des centres d’extermination situés en Pologne. Une asymétrie qui n’était pas seulement la conséquence de la géographie mais aussi d’une stratégie de médiatisation différente de part et d’autre, et bientôt de la guerre froide. De plus, lorsqu’ils étaient disponibles, les clichés de
Majdanek et d’
Auschwitz ne permettaient guère de documenter, à eux seuls, la Solution finale, processus dont le terme ultime était irreprésentable.
Les clichés permettant de documenter l’horreur portent la marque du contexte mais aussi de l’éthique et du style des photographes. Certains pratiquèrent l’autocensure refusant, comme
George Rodger, de tout photographier. D’autres, comme Margaret Bourke-White, travaillèrent avec « un bandeau imaginaire sous les yeux ». Les photographies furent saisies sur le vif mais aussi posées. Au risque d’agacer ou d’indigner parfois les survivants.
D’un photographe à l’autre, des sujets s’imposèrent de manière récurrente : déportés faméliques en uniforme rayé, photographies à l’intérieur des blocks, miradors, charniers, alignement de baraques, etc. Rares furent ceux, comme
Eric Schwab, qui osèrent les portraits en gros plan, à l’image du dysentérique mourant, l’une des images les plus emblématiques de l’univers concentrationnaire.
Les images diffusées par les Alliés pendant la guerre