Premier maillon de la construction de la mémoire de la Shoah, la médiatisation de la libération des camps, à l’Ouest comme à l’Est, relève de la propagande de guerre. Les images et les informations produites visent davantage à accuser qu’à informer.
Les rares clichés qui parviennent à la presse occidentale ne permettent donc guère de comprendre ce qu’a été la Shoah.
La stratégie de médiatisation à l’Ouest
Les journalistes sont invités à venir juger sur place de l’horreur concentrationnaire. Dans les camps où la résistance joua un rôle important, des comités de presse ont été créés par les déportés après la libération. En France, tant que la guerre se poursuit, l’information est soumise à la censure pour toutes les nouvelles concernant le sort des Français en Allemagne. Le gouvernement ne souhaite pas inquiéter l'opinion qui attend le retour de plus de 2 millions de personnes.
Au printemps 1945, les informations en provenance d’Allemagne affluent soudain alors que rentrent les premiers déportés. Les médias, et notamment la presse, y consacrent une large part et contribuent à fixer une première image de la déportation. Au rythme de l’actualité, la presse révèle à l’opinion l’existence des camps dans des articles mêlant émotion et révolte.
L’information, rarement précise, ne distingue guère les différentes catégories de déportés tandis que les camps sont assimilés les uns aux autres. Les photographies permettant de les illustrer sont souvent considérées comme interchangeables.
La stratégie de médiatisation à l’Est
Après avoir médiatisé la découverte de
Majdanek sans rien taire de l’origine juive des victimes, la communication relative à la libération du camp d’
Auschwitz occulte cette dimension essentielle des massacres.
La volonté d’informer cède donc le pas aux exigences de propagande : glorification de l’Armée rouge, dénonciation du fascisme, valorisation du martyre de l’Union soviétique moyennant l’assimilation des différents types de victimes.
De fait, en janvier 1945, l’attitude du pouvoir soviétique à l’égard des Juifs a changé. Le soutien des communautés juives occidentales apparaît comme moins nécessaire tandis que l’Union soviétique entend faire valoir son propre sacrifice à la table des négociations.
Fonctions et limites de la photographie