Des gens de la Croix-Rouge vous attendaient-ils à votre arrivée à Paris ?
Je ne me rappelle pas. La Croix-Rouge, je ne la porte pas dans mon cœur. Ils n’ont rien fait pour nous. Ils ne nous rien apporté, pas un seul paquet. J’étais très malade et j’avais surtout très peur en rentrant, j’avais toujours donné un faux nom. Je me disais : « Alors, maintenant en rentrant, ils vont voir que je suis née en Allemagne, ils sont capables de me renvoyer. » Je ne savais pas quoi faire. À l’hôtel Lutetia, une de mes camarades, qui était avec nous à St-Michel dans la Résistance, m’a dit : « Tu dis ton vrai nom, tu n’as plus rien à craindre. » Je ne suis restée que quelques heures au Lutetia. Ils attendaient une ambulance pour m’emmener à l’hôpital Bichat. De l’hôpital, j’ai envoyé un pneumatique à un ami demandant des nouvelles de mes parents. « Tes parents vivent, ton frère aussi » m’a-t-il répondu. Cette nouvelle a provoqué une crise de larmes. Ensuite, ma mère est venue me voir à l’hôpital.
Il a fallu presque un an pour me retaper (je pesais 28 kg). Sur mon bulletin, il était écrit : « État rachitique extrême. » Dans mon état, on ne pouvait même pas m’opérer. Je suis restée, je crois, deux mois et demi à Bichat. Puis j’ai été en maison de repos à Moissac, puis dans une autre maison et je suis retournée à l’hôpital. Au bout de dix mois seulement, ils ont pu commencer à me soigner.